La pierre de Rosette
Plus communément nommé à l’époque le langage des dieux, ce système d’écriture figuratif formant un ensemble complexe de signes représentant des mots, des sons et parfois uniquement une indication sémantique, les hiéroglyphes sont le plus ancien protocole de chiffrement reconnu à ce jour. Réputés impossible à décrypter, c’est une découverte archéologique, assez singulière, qui permettra d’en percer les secrets. Une clé, un lexique, sous la forme d’une stèle, la pierre de Rosette.
La cryptographie symétrique est une des plus anciennes formes de chiffrement. Elle présente l’avantage de chiffrer et de déchiffrer les messages au moyen d’un même mot clé.
On retrouve des traces de son utilisation dans l’ancienne Egypte. Les hiéroglyphes sont les plus célèbres à avoir été décodés au moyen de la pierre de Rosette.
une découverte capitale
C’est au cours d’une campagne militaire de l’armée française sous Napoléon que la pierre de Rosette fut découverte en 1799. À cette époque, plusieurs scientifiques faisaient parti de l’expédition. Rachid, nommé Rosette en français est un village situé à 50 km à l’Est d’Alexandrie. C’est là que le lieutenant Pierre Bouchard, un polytechnicien découvrit ce fragment de stèle dans un coin du fort qu’ils occupaient.
Cet artéfact se présente comme un très imposant bloc de granite de 112 cm de hauteur, de 76 cm de large et 28 cm d’épaisseur, son poids fut, à l’époque, estimé à 760 kg. Pierre Bouchard constata que cette pierre portait sur l’un de ses faces, un ensemble de signes composant 3 textes distincts.
Ceux de la bande supérieure sont rédigés en hiéroglyphes que plus personne ne comprend depuis plusieurs siècles. Les textes de la bande du milieu, sont une écriture que les savants présents ne parviennent pas à identifier. Enfin, le texte de la bande inférieure est écrit en grec ancien. Transportée jusqu’au Caire, beaucoup d’experts se sont précipités pour l’étudier.
Pierre de Rosette © Pixabay
Temple de Philae © Pixabay
Une histoire pérenne
Ce fragment de stèle révèle finalement que les écritures différentes font état d’un seul et même texte traduit dans 2 langues, le récit de la bande centrale est en fait une forme de hiéroglyphes simplifiés ou écriture démotique (populaire en grec).
Après la défaite des Français face à l’Angleterre, la pierre de Rosette est envoyée à Londres. À cette époque, les premières tentatives de déchiffrement s’axent essentiellement à comprendre ce que racontent les textes gravés sur la stèle. Ces traductions ont permis de déterminer le contexte dans lequel ces textes furent gravés. C’est le Grec ancien qui fut assez vite traduit. On y apprend qu’après le couronnement du pharaon Ptolémée V Épiphane, celui-ci fait un don d’argent et de grains aux temples égyptiens et que, lors de la huitième année de son règne, il a endigué une importante crue du Nil afin d’aider les agriculteurs.
En remerciement, les prêtres s’engagent à célébrer chaque année l’anniversaire du roi, celui de son couronnement et à vénérer Ptolémée comme un dieu. Enfin, une copie de ce texte devra être placée dans chaque temple, écrite dans trois langues : la langue des dieux (hiéroglyphes), la langue des documents (démotique) et la langue des Grecs.
L’ébauche d’une clé
Si l’idée de se servir des textes de cette stèle pour tenter de déchiffrer les hiéroglyphes a mis tous les savants de l’époque d’accord, les moyens d’y parvenir, eux ont longuement divisés. Certains voulaient commencer par le démotique et d’autres directement par les hiéroglyphes. Dans les deux cas, personne ne comprenait les textes. Des alphabets sont proposés dans l’étude du déchiffrement de la langue démotique, mais sans succès.
Il faut attendre les travaux de Jean-François Champollion, dit Champollion le Jeune pour qu’enfin, le protocole de chiffrement le plus ancien de l’humanité soit enfin décodé, du moins partiellement. Dans son manifeste, il y définit les hiéroglyphes comme « un système complexe, d’une écriture tout à la fois figurative, symbolique et phonétique dans un même texte, une même phrase, jusque dans le même mot ».
Des références à la pierre de Rosette dans le monde informatique
Les utilisateurs de VPN pour macOS ne manqueront pas de sourire à la lecteur de cette page. En effet, sans les problèmes de compatibilité liés à la sortie de la puce M1 d’Apple, le logiciel Rosetta serait complètement passé inaperçu. C’est pourtant un énorme clin d’oeil à la pierre de Rosette qui est fait avec ce logiciel et plus précisément sa version 2.
Rosetta est un traducteur direct de code binaire PowerPC, permettant l’exécution sans altérations des logiciels conçus pour les ordinateurs Apple à base de processeurs Intel.
Pour conclure
De nos jours, les hauts niveaux de chiffrement disposent d’une clé connue, ceux utilisés par les réseaux privés virtuels ne font pas exception. Il faut savoir, que les données ne sont pas décodées en raison des temps de calcul hors de la portée de nos machines. Bien que n’ayant pas réellement inspirer les cryptologues, la pierre de Rosette obéissait déjà à une logique de décodage utilisés notamment avec un carré de Polybe.
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